samedi 14 octobre 2023

Assassinés

Hier, mon collègue Dominique Bernard a été assassiné pour s'être interposé face à un tueur qui cherchait, semble-t-il, un prof d'Histoire-géo (J'emploie ici le conditionnel). Il y a deux ans j'écrivais ceci, à propos de l'assassinat de Samuel Paty. 

"Un collègue est mort assassiné d'avoir voulu enseigner. C'était son métier et son devoir : enseigner l'esprit critique à travers un document, la caricature. 

La nature même du document invite à la réflexion : « charge d'une façon exagérée » (du verbe italien caricare, venu du latin carricare : charger, lester un char de poids), par extension « en rajouter » 

Pour être clair charger la mûle! 

On sait, ou l'on doit savoir, quand on voit une caricature, qu'elle est déformation, exagération et non manifestation de vérité. Même si certaines vérités peuvent se glisser sous l'angle de nos réactions. Et notre société l'autorise. Le blasphème n'est blasphème que pour le croyant. L'incroyant, l'autre croyant, ne peut voir de blasphème là où n'est pas son dieu. Il peut Le concevoir et il peut aussi assumer de blasphémer. 

L'enseignant se doit d'enseigner.  Personnellement je montre ces documents  en lien avec la liberté d'expression. Et aussi la liberté de croire de chacun et la respectabilité des croyances. C'est ma manière d'équilibrer les choses : le droit au foulard des parents accompagnateurs (par exemple) et le droit à caricaturer le prophète. 

C'est l'enjeu de la laïcité : un triangle simple et fragile, équilatéral: 

Premier côté  : la liberté de conscience (croyances et incroyance).

Deuxième côté : l'égalité des postures ainsi nées de cette liberté.

Troisième côté :  la neutralité nécessaire de l'Etat qui en découle. 

Nous continuerons à montrer les caricatures. Nous continuerons à enseigner l'importance du fait religieux dans l'histoire des civilisations. Nous continuerons à rester neutres. Libres; égaux; neutres." 

Parce que fonctionnaires d'un état laïc, les enseignants sont devenus des cibles. Doivent-ils se résoudre à ne plus enseigner la laïcité? Doit-on modifier la doctrine de l'Etat laïc? Bien sûr que non. Mais ils ne peuvent être les victimes sacrifiées d'un gouvernement qui agite les manches et hausse la voix mais ne fait rien. Où est l'argent de la lutte contre la radicalisation? Concrètement que fait-on à part des rondes avec des voitures ciglées "Vigipirate" sans aucun effet?

mardi 10 octobre 2023

La France et ses valeurs

Ce post a initialement été publié le 26 mars 2020 pendant le premier confinement. Actualisé ce jour avec de nouveau titres.


Quelques liens plus ou moins intéressants selon que l'on aime ou non la chanson française. Les chansons suivantes éclairent et utilisent les enjeux de la devise républicaine : Liberté, égalité, fraternité.
- La "chanson parfaite" d'Alain Souchon (album Ultra Moderne Solitude") ; ICI ("Ce serait une chanson parfaite, un truc profond, pour tous les gens de la planète, mettons...")
-  Le groupe La belle Bleue propose une réflexion très second degré avec "le Triptyque", dans son dernier album Le Refuge.  ICI (A mort la fraternité, l'égalité est perdue d'avance, pourquoi courir après? la liberté un bel idéal mais trop dangereux pour n'être que rêvé...")
Des chansons plus connues évoquent aussi les valeurs de la France :
"Ma France" de Jean Ferrat est clairement une chanson engagée à gauche et peut se lire comme une interprétation communiste du modèle français.  à écouter ICI ("Cet air de liberté au-delà des frontières"...)
- Lui fait écho le rap de Diam's, "Ma France à moi", qui montre les limites de l'intégration et l'exclusion de nombreuses franges de la société. ICI Mais elle rappelle la nécessité du mélange et de la fraternité.
De même le groupe Zebda a multiplié les chansons sur les limites du modèle Républicain : Un je ne sais quoi  a pour thème les difficultés que rencontrent certains enfants d'immigrés pour s'intégrer à l'école. 
-  "Douce France" de Charles Trenet évoque un pays heureux et insouciant. Repris par le groupe Carte de Séjour du regretté Rachid Taha dans une version rock : ICI.
Mais "Ma France" c'est une thématique dont chacun peut s'emparer et nombreux sont les autres auteurs à s'inspirer du modèle ou des défauts du pays.
La chanson "Hexagone" de Renaud est sans doute la critique la plus acerbe et permet bien de comprendre l'état d'esprit d'une partie de la jeunesse au cours des années 1970 : ICI. C'est le modèle dont s'inspire Raphaël pour dresser un  sombre tableau de la France et des français : Le Patriote.. Orelsan reprend cette critique dans son titre L'odeur de l'essence
- Déjà dans les années 1950, Boris Vian avait signé une chanson éminemment contestatrice, Le Déserteur. Cette lettre adressée au Président de la République a été chantée par Mouloudji et Reggiani et sert de modèle à Renaud en 1983 pour chanter Déserteur et plus récemment à Gauvain Sers : ICI
Fils de France de Saez, un jour en France de Noir Désir, la Sentinelle de Luke évoquent le 21 avril 2002.
Une critique radicale de la France coloniale par Kery James permet de questionner le passé colonial, la responsabilité républicaine dans un racisme pas toujours éteint. ICI
Inversement le rappeur Abd Al Malik réinterprète la Marseillaise dans un moment de crise de la République. 
Enfin il faut réécouter Georges Brassens s'opposer à l'engagement dans les causes collectives dans sa chanson  Mourir pour des idées. Elle questionne le fait de penser avoir raison et de se battre pour une cause : à méditer.... 
Un article, ici, permet de retrouver certaines de ces chansons et bien d'autres encore!